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Une révision édulcorée du droit de la société anonyme - Faut-il s'attendre à une nouvelle ruée sur les bonus ?

Bern (ots)

Depuis plus de dix ans, Travail.Suisse, l'organisation indépendante des travailleuses et des travailleurs, étudie le développement des salaires des managers. Le bilan de la 14ème enquête est contrasté, cependant l'écart salarial continue de se creuser dans la majorité des entreprises examinées. Les chefs s'octroient de grasses augmentations salariales, pendant que la pression sur les salaires, l'insécurité et la peur de perdre son poste augmentent pour les bas revenus. L'initiative adoptée contre les rémunérations abusives ne parvient pas à arrêter cette tendance. Les mesures mises en oeuvre dans la révision du droit de la société anonyme ne sont pas assez efficaces.

Depuis déjà quatorze années consécutives, Travail.Suisse enquête sur l'écart salarial entre les salaires les plus bas et les plus hauts dans 26 entreprises suisses. Cette analyse met en évidence des développements inquiétants.

Pas d'année record pour les managers, mais l'écart se creuse encore

En comparaison avec les années précédentes, le développement des salaires des managers a été un peu plus modeste en 2017, cependant la majorité des membres de la direction des groupes se sont réjouis de leurs rémunérations. Depuis 2011, les salaires à l'étage de la direction ont grassement augmenté de 16%, alors que les travailleurs normaux ont dû se contenter, durant la même période, d'augmentations salariales de 3,8%. « Les salaires en haut de la hiérarchie ont donc augmenté quatre fois plus que ceux d'en bas. En conséquence, l'écart salarial ne cesse d'augmenter », dit Adrian Wüthrich, Président de Travail.Suisse. Comme le montre l'étude sur les salaires des managers, l'écart salarial moyen dans les entreprises était, en 2011, encore de 1 à 45 et a augmenté jusqu'à 2017 à environ 1 à 49. Cette évolution n'est pas du tout une exclusivité des plus grandes entreprises des branches financières et pharmaceutiques, on la retrouve, en effet, dans toutes les branches. Comme exemples représentatifs de cette augmentation de l'écart salarial au cours des dernières années, nous avons Valora avec le CEO Michael Müller (de 1:23 à 1:60), Lonza avec son chef Richard Ridinger (de 1:40 à 1:85), Yves Serra de Georg Fischer (de 1:32 à 1:63), ainsi que les autres membres de la direction du groupe de Valora (de 1:12 à 1:28) ou ABB (de 1:64 à 1:87).

Une révision du droit de la société anonyme avec peu de mesures efficaces

La semaine dernière, le Conseil national a traité la révision du droit de la société anonyme et a ainsi clôturé la mise en oeuvre de l'initiative contre les rémunérations abusives. À cette occasion, il a malheureusement manqué une opportunité pour lutter avec des mesures efficaces contre les salaires exorbitants des managers. Du point de vue de Travail.Suisse, les lacunes suivantes en sont la cause :

   -	Manque de transparence : La transparence reste lacunaire car à 
l'avenir aussi, les rémunérations des membres de la direction des 
groupes ne doivent pas être indiquées individuellement.
   -	Des votes peu judicieux : Lors des assemblées générales, il faut
voter sur les rémunérations du management. Mais cela peut être 
effectué en un tour commun pour les salaires fixes et les bonus. La 
fonction de contrôle reste donc très restreinte : Les bonus doivent 
être approuvés par des votes prospectifs, sans connaissance des 
prestations fournies ni du cours des affaires.
   -	Contournement : Les indemnités d'entrée et de départ vont être 
interdites, mais elles restent possibles en tant que primes d'entrée,
compensant ainsi les pertes de bonus à l'avenir de la part de 
l'ancien employeur. Le maintien de versements du salaire pour des 
durées excessivement longues, les clauses de non-concurrence et les 
contrats de prestations de conseil sans transparence restent 
également possibles.
   -	Pas de limite pour les bonus : Un règlement de la part maximale 
des bonus par rapport à la rémunération complète brille par son 
absence totale. Des parts de bonus allant jusqu'à plus de 80% de la 
rémunération complète avec les fausses incitations correspondantes 
restent donc toujours possibles.

« Avec une telle mise en oeuvre, les exigences de l'initiative contre les rémunérations abusives sont ainsi bloquées à mi-chemin. Avec peu de mesures efficaces dans le droit de la société anonyme, la disparition des salaires des managers de l'agenda politique et une conjoncture favorable, il faut s'attendre à une nouvelle ruée sur les bonus », poursuit Adrian Wüthrich. « Le montant indécent des salaires des managers et l'écart salarial grandissant conduisent à une rupture entre la population et l'économie, avec des conséquences politiques imprévisibles. »

Valeurs indicatives hommes/femmes : une étape nécessaire et urgente

Un résultat positif des débats parlementaires de la révision du droit de la société anonyme se situe dans l'introduction de valeurs indicatives à durée limitée pour la représentation des hommes et des femmes dans les directions des groupes et dans les conseils d'administration. Cette mesure était urgente et nécessaire, comme le montre l'étude des salaires des managers de Travail.Suisse. Dans les entreprises examinées, il existe 213 postes dans les directions des groupes. Fin 2017, seuls 14 de ces postes étaient occupés par des femmes, ce qui donne une proportion honteuse de femmes de 6.7 %.

Contact:

- Adrian Wüthrich, Président de Travail.Suisse et Conseiller
national, Mobile : 079 287 04 93
- Jacques-André Maire, Vice-président de Travail.Suisse et Conseiller
national, Mobile : 078 709 48 50
- Gabriel Fischer, Responsable de la politique économique de
Travail.Suisse, Mobile : 076 412 30 53

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