Schweizerischer Nationalfonds / Fonds national suisse
FNS: Le PNR 58 se penche sur l'exercice des religions en prison
Bern (ots)
En quête de salut derrière les barreaux
La liberté de religion est un droit humain, qui en principe n'est pas enfreint dans les prisons de Suisse. Mais l'aumônerie de prison devrait s'adapter à l'émergence du pluralisme religieux, ethnique et linguistique dans les établissements pénitentiaires. Telle est la conclusion d'une étude menée dans le cadre du Programme national de recherche «Collectivités religieuses, Etat et société» (PNR 58).
La pluralisation des religions est un phénomène qui se manifeste sous une forme accentuée en prison. Les détenus ne sont plus seulement protestants ou catholiques, mais aussi musulmans, bouddhistes ou d'une autre confession. Des chercheurs du Programme national de recherche «Collectivités religieuses, Etat et société» (PNR 58) ont examiné la façon dont les prisons gèrent cette nouvelle situation.
Aumônerie de prison: traditionnellement catholique ou protestante Traditionnellement, les aumôniers des prisons sont de confession catholique ou protestante. Dans le quotidien carcéral, ces personnes continuent de jouer un rôle de premier plan. Elles assument même un nombre croissant de tâches, souvent à la limite de la surcharge. Les aumôniers s'occupent des détenus, ils les acceptent indépendamment de leur foi, les accompagnent au plan spirituel, célèbrent avec eux des fêtes et des cérémonies religieuses, tout en étant à l'écoute de leurs problèmes privés et quotidiens.
Cette augmentation des tâches des aumôniers a son envers, affirme l'ethnologue Irene Becci, directrice de l'étude: souvent, ces derniers édulcorent les différences qui existent entre les fois religieuses. Quant aux détenus, s'ils les sollicitent, ce n'est pas en raison de leurs compétences religieuses, mais parce que ces moments constituent le seul moyen d'échapper au quotidien en cellule, souvent tendu et empreint de violence.
Le rôle important des intervenants compatriotes et des parents La pluralisation religieuse entraîne aussi l'apparition d'une offre, souvent informelle, de soutien spirituel: cette dernière est proposée par des intervenants évangéliques (issus p. ex. de l'Armée du salut) et holistes (qui proposent des séances de yoga et de méditation), mais aussi par des intervenants compatriotes ou des parents - notamment dans le cas des détenus étrangers. Pour Irene Becci, la situation n'est pas satisfaisante. Les intervenants compatriotes sont tout juste tolérés par les directions des prisons, alors qu'ils rendent d'importants services psychologiques et religieux. Quant aux intervenants évangéliques et holistes, leurs connaissances des autres religions ne sont pas bonnes.
Islam et stéréotypes Dans la plupart des prisons, l'islam est un sujet abondamment thématisé. D'un côté, des hypothèses stéréotypées sur l'islam en tant que tel circulent souvent parmi le personnel et les détenus non-musulmans: il serait violent et prescrirait l'oppression de la femme par l'homme. De l'autre, l'islam place les prisons face à de nouveaux défis, en particulier le jeûne pendant le ramadan, la prière collective du vendredi, ainsi que les interdits alimentaires.
Les grandes prisons font des concessions pour répondre à ces besoins, mais c'est aux fidèles de prendre l'initiative. Les directions des prisons autorisent certaines exceptions pour le ramadan. De temps à autre, un imam passe pour la prière du vendredi. Mais à la différence des représentants des confessions chrétiennes, en règle générale, ce dernier n'a pas de bureau à sa disposition dans l'enceinte de la prison. L'interdiction de consommer de la viande de porc entraîne parfois des tensions. Dans certains établissements, les détenus ont la possibilité de manger de la viande halal, mais doivent la payer de leur poche. Dans certaines prisons, c'est la serviette de bain qui tient lieu de tapis de prière, car ces derniers sont interdits.
Revaloriser et professionnaliser l'aumônerie de prison Pouvoir exercer sa religion, en prison également, est un droit humain et en règle générale, il n'est pas enfreint, affirme Irene Becci. Mes les besoins religieux des détenus devraient être mieux pris en considération et mieux respectés. En effet, rappelle la chercheuse, la religion permet souvent aux détenus de bâtir des relations, grâce auxquelles ils se déchargent du climat difficile du quotidien carcéral.
Les chercheurs émettent donc trois recommandations. Premièrement, il s'agit de revaloriser l'aumônerie de prison, par exemple en mettant à disposition des locaux accessibles à tous les détenus. Le travail des aumôniers informels, c'est-à-dire des intervenants évangéliques et des parents, devrait également être intégré dans le quotidien carcéral. Deuxièmement, les aumôniers devraient être formés pour faire face au pluralisme religieux, ethnique et linguistique. Troisièmement, il faudrait améliorer l'information du personnel concernant différents aspects de l'islam, mais aussi les cultures africaines et arabes.
Pour leur enquête, les chercheurs ont analysé la législation en rapport dans l'ensemble des cantons, interrogé par écrit douze grands établissements pénitentiaires et mené trente entretiens intensifs dans trois prisons (deux en Suisse romande, une en Suisse alémanique) avec des détenus, des aumôniers de prison et le personnel, tout en analysant différentes manifestations religieuses.
Le résumé du projet de recherche ainsi que le texte de ce communiqué sont disponibles sur le site internet du Fonds national suisse: www.fns.ch > Médias > Communiqués de presse
Kontakt:
Irene Becci
Universität Bielefeld
Fakultät für Soziologie
D-33501 Bielefeld
Tél. : ++ 41 21 651 62 80
e-mail: irene.becci@eesp.ch