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Congrès SSES "Energies renouvelables - réalités et visions" à 'Académie Empa Le soleil n'envoie pas de facture
Dübendorf (ots)
Le congrès organisé par la Société suisse pour l'énergie solaire (SSES) a présenté un vaste aperçu des différents aspects de l'utilisation des énergies renouvelables et permis aussi de se faire une idée de l'ampleur du gaspillage actuel des combustibles fossiles. Un large public d'experts s'est réuni à l'Académie Empa pour un échange actif entre la recherche et la pratique dans la perspective des développements actuels et futurs.
La situation ne peut pas être plus claire: Tôt au tard les réserves d'énergie fossile seront épuisées. Une raison plus que suffisante pour ne pas attendre ce moment pour se mettre à la recherche d'énergie de substitution et de promouvoir leur utilisation. Aujourd'hui déjà il existe dans la construction de très nombreuses solutions permettant une utilisation économe de l'énergie et cela jusqu'à la maison "zéro énergie". Ces techniques d'économie d'énergie ne sont pas uniquement applicables sur les nouvelles constructions. L'architecte zurichois Karli Viriden a démontré, avec la rénovation d'un immeuble centenaire situé dans le Kreis 4 de la ville de Zurich, que le standard "maison passive" peut aussi être réalisé sur des constructions anciennes et qu'une réduction de la consommation d'énergie d'un facteur 10 dans la rénovation des immeubles n'est pas qu'une vision chimérique.
2000 Watt c'est assez
Mark Zimmermann qui dirige le Centre pour l'énergie et la durabilité dans la construction de l'Empa, a présenté sa vision de la société 2000 Watt. La réalisation de cette vision demande un retour de la consommation d'énergie par habitant au niveau de celle de 1960, ce qui implique une réduction atteignant presque les deux tiers de la consommation actuelle moyenne. Pour réaliser cet objectif, il est d'avis que les trois quarts de l'énergie nécessaire devraient provenir de ressources renouvelables et que cette réalisation nécessite dans les cinquante années à venir une réduction générale de la consommation d'énergie et une augmentation notable du rendement de l'énergie consommée.
De l'instrument de relations publiques à une branche de l'économie à l 'avenir prometteur
L'amélioration du rendement était elle aussi au centre de l'exposé présenté par Kai Deponte. Ce responsable de la distribution pour l'Europe de BP Solar indique que son entreprise désire perfectionner encore ses installations photovoltaïques qui occupent une place de pointe sur dans ce domaine avec une part de marché atteignant actuellement 18 %. Sans une prise de conscience accrue des problèmes liés à l'énergie rien n'est possible: "Ce n'est qu'en rendant visible d'où provient l'énergie que nous consommons que la population prendra plus largement conscience des problèmes énergétiques" a relevé Deponte.
Le groupe pétrolier et pétrochimique BP prend les énergies de substitution au sérieux: Sa branche photovoltaïque créée il y a juste 30 ans en réponse aux reproches des activistes de l'environnement est aujourd'hui devenue une de ses secteurs d'activité importants et ce groupe est bien décidé à se tailler sa part dans le marché futur estimé à plusieurs milliards de francs.
Le vent souffle lui aussi gratuitement
Les installations éoliennes sont, à côté des panneaux photovoltaïques, une autre possibilité d'utiliser une énergie renouvelable disponible en quantités pratiquement infinies. Thea Hefti de l'entreprise Zürcher Windcraft AG a décrit à partir d'exemples de projets concrets la construction et l'exploitation des centrales éoliennes. "L'énergie éolienne est un marché porteur en tant qu'énergie complémentaire des autres formes d'énergie" a déclaré Thea Hefti en citant comme exemple éclatant l'Allemagne. "Depuis le mois d'avril 2000, notre voisin nordique possède la législation la plus moderne au monde en matière d'énergies renouvelables avec une garantie d'injection sur les réseaux de distribution et un prix minimum garanti pour les producteurs". Cette loi facilite grandement les investissements dans les installations de production d'énergie renouvelable, comme l'a aussi souligné le représentant du groupe BP Deponte qui a encore ajouté que cette loi était pour une grande part à l'origine du taux de croissance des installations photovoltaïques de plus de 60 % enregistré l'année passée. Selon Hefti, les parcs éoliens "offshore" qui seront réalisés dans un avenir proche sur les mers du monde entier sont encore plus prometteurs et contribueront encore au "boom éolien". «Avec un taux de croissance qui dépasse celui de l'industrie électronique, l'industrie éolienne est l'industrie qui présente actuellement le plus fort taux de croissance sur le plan mondial».
Les fonds verts en chute libre
Le grand boom des fonds verts appartient par contre au passé. C'est ce que constate Erol Bilecen, gestionnaire de fonds de la banque Sarrasin. Avec la chute libre de la bourse, les investissements durables ont subit une perte de valeur atteignant 63% rien que pour la période de mai 2001 à octobre 2002. Cet argent "détruit" a une conséquence particulièrement négative en ce sens qu'il n'est soudainement plus disponible pour soutenir de façon ciblée et durable le financement des énergies renouvelables. La conjoncture n'épargne ainsi pas non plus l'économie durable. Non sans une teinte d'ironie, Bilecem fait remarquer que les perspectives à plus long terme des investissements durables sont tout de même positives car "un jour ou l'autre les énergies non renouvelables seront bien définitivement épuisées".
Le peuple n'a malgré tout pas toujours raison
L'échec de la politique énergétique - avec la bénédiction du souverain - tel était le thème abordé par la Conseillère nationale Regine Aeppli. «Les Suisses sont un peuple de "neinsager" a-t-elle déclaré non sans provocation pour commenter l'échec des votations sur le thème de l'énergie ces dernières années. «Le peuple a certes toujours raison» déclare-t-elle, "mais permettez-moi d'en douter en ce qui concerne le thème de l'énergie" Elle plaide en faveur d'un changement d'esprit dans notre pays et préconise l'internalisation des coûts externes. La conseillère nationale Aeppli est d'avis que le prix des énergies fossile continue à être maintenu artificiellement bas et elle en attribue la responsabilité au puissant lobby des milieux économiques et des partis bourgeois. Elle annonce toutefois une nouvelle offensive en matière de politique énergétique avec pour objectif de faire passer en Suisse aussi une loi reprenant les objectifs de la loi allemande sur les énergies renouvelables plusieurs fois citée en exemple lors de ce congrès.
La guerre du pétrole ou la paix solaire
Dans son exposé, le journaliste de télévision allemand Hans Alt, qui s'engage pour une utilisation sans compromis des énergies renouvelables, s'est penché sur un avenir encore plus lointain. La démonstration de force de l'unique puissance mondiale subsistante pour s'assurer, au besoin en recourant à l'intervention armée, les réserves de pétroles encore existantes le remplit d'effroi. Selon un scénario catastrophe qui repose sur des estimations de la société de réassurance Münchner Rückversicherung, le coût des dégâts naturels jusqu'en 2050 dépassera le produit social brut cumulé de tous les pays du monde. Ce scénario repose sur l'hypothèse que l'humanité n'adaptera pas son comportement au milieu naturel. "Dans un monde où plus de 100 espèces animales et végétales disparaissent chaque jour, nous pouvons calculer nous-mêmes quand l'espèce humaine elle aussi aura disparu" a-t-il lancé en guise d'avertissement.
Hans Alt pense que la seule voie pour échapper à cette échéance brutale réside dans l'application d'une politique énergétique durable. «Nous consommons actuellement en un seul jour autant d'énergie que la nature en a produit en 50'000 jours». C'est ce qu'il nous donne à réfléchir et au vu des réserves d'énergies fossiles de plus en plus rares, il plaide en faveur de l'utilisation du solaire et de l'éolien. «La politique doit toutefois exercer sa fonction régulatrice et créer les conditions nécessaires. Ce n'est qu'ainsi que cette substitution sera possible» Pour Alt la solution au problème de la survie de l'humanité est dans le ciel car le soleil "envoie sur la terre 15'000 fois plus d'énergie que nous n'en avons besoin à nous tous". Et il a conclu en se demandant si les hommes vont enfin s'ouvrir à la lumière céleste ou vont continuer à contempler les trous noirs dans la terre. Notre avenir est entre nos mains.
Pascal Lorenzini