Discours Suisse - Sans-papiers: Moins perçus et moins défendus en Suisse alémanique
Zurich (ats/ots) -
Eclairage
Jusqu'à peu, les sans-papiers étaient une catégorie inexistante, niée, en Suisse alémanique. Ils bénéficient par conséquent d'un soutien encore modeste, et la volonté politique de les régulariser est aussi plus molle.
"Les sans-papiers sont un problème romand", voilà l'opinion qui prévalait et prévaut en partie encore Outre-Sarine. L'étude commandée par le ministre de la justice Christoph Blocher et parue ce printemps a pourtant remis l'église au milieu du village.
Elle attribue ainsi quelque 20'000 sans-papiers au seul canton de Zurich, sur 90'000 en Suisse, et montre que le phénomène, national, ne relève pas de la politique d'asile mais est surtout de nature économique. Des gouvernements cantonaux comme celui de Zurich continuent à le minimiser, mettant en doute les résultats de l'étude.
Le Tessin, qui abriterait 2'000 clandestins, en fait de même. "Les chiffres fournis par la police sont bien inférieurs", déclare le conseiller d'Etat Luigi Pedrazzini, pour lequel, toujours et encore, "le problème des sans-papiers n'existe pas au Tessin". Même son de cloche en Valais, qui est un peu "l'exception romande".
Mobilisation tardive
En Suisse alémanique, la création récente de collectifs et bureaux pour sans-papiers à Bâle, Berne et Zurich "rend le problème enfin visible", dit Balthasar Glättli, secrétaire général de Solidarité sans frontières. Mais pourquoi si tard? "Nous n'avions longtemps pas de liens réels avec les clandestins", explique le co-président des Verts zurichois.
Denise Efionayi, directrice adjointe du Forum suisse pour l'étude des migrations, avance elle la "crainte des défenseurs de se mouiller" dans un contexte politique plus dur, particulièrement dans le canton de Zurich. En Suisse romande, où les mouvements pour les sans-papiers existent depuis longtemps, on pointe volontiers le doigt sur l'épouvantail qu'est l'UDC Outre-Sarine dans le domaine de l'asile.
Protection sociale faible
Conséquence de cette mobilisation tardive, les personnes en situation illégale bénéficient d'une protection sociale globalement moins bonne en Suisse alémanique et sont davantage exposés aux dénonciations. Une étude réalisée fin 2002 par Denise Efionayi est pour l'essentiel encore actuelle aujourd'hui, avec des progrès nets depuis pour Bâle-Ville.
"La sécurité sociale des sans-papiers est davantage l'affaire de privés en Suisse alémanique", résume Mme. Efionayi. Parallèlement à l'idée d'un Etat moins actif socialement, une "attitude plus légaliste" prévaut Outre-Sarine. La nécessité de faire appliquer la loi l'emporte sur les droits humains fondamentaux, qui ont un plus grand poids en Suisse romande, explique Vania Alleva, du syndicat Unia.
Politique plus restrictive
Le nombre de "cas de rigueur" présentés à la Confédération depuis 2002 est éloquent: 90#% ont été transmis par les cantons romands, pour un pourcentage équivalent d'autorisations accordées, selon des chiffres de l'Office fédéral des migrations (ODM). Seuls 10 cas provenaient de Zurich, 140 de Berne, 20 de Bâle-Campagne et 16 de Bâle-Ville (contre 63 pour Neuchâtel, 580 pour Genève et 1935 pour Vaud).
La "circulaire Metzler" pour la régularisation des clandestins en situation "d'extrême gravité" laisse de fait une marge d'interprétation importante, constate Myrtha Welti, présidente du Groupe pour les sans-papiers de la Commission fédérale des étrangers (CFE). Cette instance neutre instituée en janvier 2005 se propose de créer un catalogue de critères précis d'ici 2006.
La nécessité de lignes directives claires pour les cantons devrait encore s'accroître si le phénomène des clandestins prend de l'ampleur avec le durcissement de la loi sur l'asile. Des syndicats observent que depuis que les requérants frappés d'une non-entrée en matière (NEM) sont privés de l'aide sociale, une nouvelle catégorie de sans-papiers est en train d'émerger.
NOTE: cet article est diffusé dans le cadre du "Discours Suisse". Le "Discours Suisse" a pour objectif de promouvoir la compréhension entre les communautés linguistiques de Suisse. Elle est le fruit d'une collaboration entre Forum Helveticum, Netzwerk Müllerhaus et l'ats. Vous trouvez de plus amples informations sous http://www.discours-suisse.ch.
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